Si, dans un couple marié sous le régime de la communauté, l’un des époux n’est pas autorisé à effectuer une donation sans l’accord du second, il peut désigner, en revanche, une personne de son choix bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie sans l’aval de l’autre époux, souligne une jurisprudence récente.
Une donation et le bénéfice d’une assurance-vie sont deux choses différentes. C’est ce qu’a rappelé la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 20 novembre 2019. La plus haute juridiction française devait juger un litige financier entre une veuve et la maîtresse de son défunt mari.
L’histoire concerne un couple, d’abord marié sous le régime de la séparation des biens, qui a adopté en 1988 le régime de la communauté universelle. Au décès de l’époux, son épouse assigne en justice sa compagne adultère, afin que cette dernière lui restitue les sommes issues de fonds de la communauté que le mari décédé lui avait données de son vivant. Les donations portaient sur un chèque de 200 000 euros et sur un autre de 120 000 euros tirés de deux des comptes bancaires du défunt, ainsi que sur le bénéfice d’un contrat d’assurance vie de 604 041,44 euros et d’un autre de 156 583,62 euros.
Des économies pour la communauté
Dans un arrêt daté du 27 janvier 2016, la cour d’appel de Paris avait jugé les donations illégales car, sous le régime de la communauté, une donation ne peut être effectuée par l’un des conjoints sans l’accord de l’autre à partir du moment où elle concerne des fonds communs. Or, si les deux comptes en banque avaient été alimentés en partie par les salaires perçus par le mari, ils constituaient des économies pour la communauté.
En ce qui concerne les deux assurances-vie, le défunt avait désigné pour chacune d’entre elles sa maîtresse comme la seule bénéficiaire des capitaux à son décès. La cour d’appel a estimé qu’il s’agissait là de donations indirectes portant également sur les économies du couple. La Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’Appels sur les deux chèques, mais elle casse l’arrêt pour la partie relative aux deux contrats d’assurance-vie, reconnaissant ainsi la validité des désignations bénéficiaires.
Pas d’abandon de la capacité de rachat
Les hauts-magistrats ont souligné que le souscripteur décédé n’avait pas abandonné sa capacité de rachat. La clause bénéficiaire rédigée au profit de sa maîtresse ne l’empêchait pas d’effectuer des retraits. En conséquence, le bénéfice ne pouvait être assimilé à une donation. La Cour casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Paris et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Versailles.
Source : courdecassation.fr